28 janvier 2008

NICE Liberté de la presse et Pipolisation de la vie politique française

LIBERTÉ PRESSE - Presse et vie privée des politiques : la ligne rouge.
Le 16 février 1899, le président de la République, Félix Faure, meurt d’une congestion cérébrale à l’Élysée, dans le « salon bleu » et les bras d’une maîtresse. Bien que l’homme ait donné son nom à des avenues sa mort, en galante compagnie, est à peu près le seul fait qu’il laisse dans l’histoire. À l’époque, la vie amoureuse des hommes politiques est taboue. Il faudra attendre dix ans pour savoir que Félix Faure a succombé en compagnie d’une certaine Marguerite Steinheil, demi-mondaine,qui y gagnera un poétique surnom : « la pompe funèbre ».

Ces temps où les frasques des chefs d’État demeuraient secrètes sont révolus. La plupart des médias versent désormais dans les excès de la « pipolisation » ( peopolisation ). La vie intime des personnalités politiques est fouillée au scanner. Le droit de chacun au respect de sa vie privée, et la liberté d’expression et d’information sont deux libertés fondamentales. La lecture régulière de la presse permet de constater que ces deux droits fondamentaux s’opposent. Où s’arrête la liberté d’expression ?

À quelle condition un élément de la vie personnelle peut-il être relaté, au nom du droit à l’information du public ? Il appartient aux journalistes de rechercher le juste équilibre. En la matière, les tribunaux apprécient les situations litigieuses au cas par cas, en fonction d’un critère déterminant.
« Ce critère est le suivant : l’information n’est légitime que si elle s’inscrit dans la relation d’un "fait d’actualité" ou si elle est utile dans le cadre d’un véritable débat d’intérêt général.» Jurisprudence établie, comme le souligne Me Jean-Marc Miglietti, avocat lyonnais spécialisé dans ce domaine.

On comprend, dès lors, que de manière répétitive, une certaine presse people, à sensation, franchisse la « ligne rouge » séparant la vie privée de la vie publique des personnalités politiques. Faits aggravants : depuis la campagne des élections présidentielles, des quotidiens et des hebdomadaires, réputés sérieux, s’attardent, à leur tour, sur des épisodes de la vie personnelle des candidats ou élus. Face à ces critiques, les journaux rétorquent qu’à propos de la séparation Royal Hollande, ces derniers avaient « communiqué » sur leur couple, un argument similaire s’appliquant au divorce des époux Sarkozy.
Une chose est sûre : depuis la « rumeur » du mariage Carla Bruni - Nicolas Sarkozy, de nombreux titres de la presse écrite franchissent allègrement la ligne rouge. « La vie politique française a atteint un degré de frivolité sans précédent sous quelque république que ce soit, constate Alain Duhamel dans Libération ( …) Dans la presse quotidienne de qualité, la vie privée du couple présidentiel mais aussi, à un moindre degré, des principaux responsables politiques devient une rubrique en pleine expansion... Partout dans le traitement de l’actualité politique, la forme éclipse le fond, et le décor efface la pièce ».
Il convient de rappeler qu’aucun rédacteur en chef de la presse écrite n’aurait imaginé, il y a cinq ans à peine, que la vie privée d’un président occuperait une telle place. Certes, les Français ne la dédaignent pas, comme en attestent les ventes des journaux. Cependant, la presse écrite qui traverse une période de turbulence prend un grand risque en cédant aux vertiges de la pipolisation, celui d’accentuer sa perte de crédibilité et d’altérer la confiance des lecteurs. Un sondage publié par La Croix en témoigne. Le baromètre TNS Sofres de la confiance des français dans les médias, réalisé lors de la campagne des présidentielles, révèle que 63% des personnes interrogées (contre 30%) pensent que les journalistes ne sont pas indépendants face aux pressions des partis politiques et du pouvoir.

À Nice, le club de la presse Méditerranée 06 qui réunit une soixantaine de journalistes des Alpes-Maritimes vient de publier une « lettre ouverte aux politiques » (voir ci-dessous) qui souligne « le renforcement des pressions qu’exercent ceux qui détiennent une parcelle de pouvoir sur les journalistes ». Le Club de la presse rappelle que le journaliste est tenu de faire preuve d’une certaine éthique « éviter ainsi de traiter les sujets relatifs à la vie privée, de leurs côtés, les personnalités politiques doivent respecter l’indépendance de la presse ». Ces principes, s’ils étaient respectés, de part et d’autres, devraient éviter le franchissement de la « ligne rouge ».

Paul Barelli

Le Petit Niçois







Élections : des droits et des devoirs

Les exemples foisonnent attestant du renforcement des pressions qu’exercent ceux qui détiennent une parcelle de pouvoir sur les journalistes. Les syndicats de la profession, se sont adressés en novembre, par le biais d’une pétition, à tous les Français pour proposer une loi garantissant l'indépendance des rédactions, à l'heure où les dérives déontologiques, les rachats de médias et les pressions sur le contenu de l'information se multiplient, remettant en cause le droit de chacun à une information honnête, indépendante et fiable. Le rôle d’un club de la presse n’est pas celui d’un syndicat. Cependant, le Club de la Presse Méditerranée 06 qui a pour vocation d’être ouvert aux enjeux de son époque, ne peut rester inerte face à une méfiance, voir à un mépris que certaines personnalités politiques manifestent envers la presse. Chacun peut et doit rester cantonné dans sa fonction tout en témoignant d’un respect mutuel.
Le journaliste est tenu déontologiquement de faire preuve d’une certaine éthique, éviter ainsi de traiter les sujets relatifs à la vie privée, dérive dans laquelle verse, hélas, désormais de nombreux médias. De leurs côtés, les personnalités politiques doivent respecter l’indépendance de la presse.

Paul Barelli
Vice-Président CPM06

http://www.clubpresse06.com/